Esclavage et racisme : héritages actuels et nouveaux regards transatlantiques sur le passé

Publié le 19 octobre 2021 Mis à jour le 18 octobre 2022

Journée d'études organisée par l'Inspé de l'académie de Créteil, le CIRESC (CNRS), le CESSMA UMR 245, avec le soutien de la Maison de la Recherche et de l'Innovation.

Session du matin
De l'esclavage à la mort de G. Floyd : construction, usages et circulations des représentations, du racisme et des luttes contre le racisme.

La mort de George Floyd a suscité de nombreuses mobilisations de part et d’autre de l’Atlantique, ainsi que des débats et controverses sur le racisme et l’antiracisme aujourd’hui, les analyses des représentations et des pratiques en jeu. Lors de cette matinée, des communications scientifiques croiseront les approches en sciences humaines et sociales à partir d’études de cas documentées, concernant le Canada, les Etats-Unis, le Brésil et la France. Il s’agira d’interroger de manière critique et lucide les (més)usages de l’histoire, les catégories d’analyse mobilisées par différents acteurs et les enjeux contemporains de ces questions vives, aussi bien dans les discours diffusés dans l’espace public que dans les recherches en sciences sociales et dans le champ de l’éducation, pour lutter contre toutes les formes de racisme et de discriminations.

Les enregistrements des intervenants sont accessibles en dépliant la liste de lecture disponible dans le lecteur ci-dessous.

Ouverture de la journée d'études.
- Jean-Luc Dubois-Randé, président de l'UPEC.
- Robin Bosdeveix, directeur de l'Inspé de l’académie de Créteil.
- Marie Chosson, CESSMA.
- Myriam Cottias, CIRESC.


> Intervenants

- Maira Mamede, maîtresse de conférences en Sociologie de l’éducation, CIRCEFT-ESCOL, UPEC-INSPE de l’académie de Créteil.
"Mobilisation des catégories raciales dans la recherche sur les inégalités scolaires et les politiques éducatives au Brésil."
Les catégories raciales sont prises en compte dans le recensement démographique brésilien, de même que dans les statistiques éducatives. Elles apparaissent comme fortement corrélées aux catégories sociales et trajectoires scolaires. Leur mobilisation dans la production scientifique et dans la conception de politiques de lutte contre les inégalités scolaires est au coeur du débat public actuel. Dans cette communication nous discuterons les effets sociaux de la production de ces données et de leur inclusion dans les politiques publiques.

- Francine Nyambek Mebenga, maîtresse de conférences en Sciences de l’éducation, LIRTES, UPEC-INSPE de l’académie de Créteil, référente lutte contre le racisme et l’antisémitisme de l'UPEC.
"Meurtre de George Floyd : réception des mobilisations en France et enjeux de formations."
L’intervention porte sur les mobilisations liées au décès de George Floyd, et les controverses qu’elles ont suscitées en France, pour interroger les enjeux de la formation à l’antiracisme à l’école et/ou l’université. Dans le prolongement des réflexions conduites sur ce sujet, lors du cycle de conférences organisé par la mission lutte contre le racisme et l’antisémitisme de l’UPEC (entre septembre 2020 et mars 2021), nous explorons la manière dont ces controverses interpellent les politiques antiracistes, en général et la prise en charge du racisme dans le champ de l’éducation et de la formation, en particulier. Nous prendrons appui sur un corpus de travaux de recherche, discours politico-médiatiques, textes officiels et curricula scolaires visant à lutter contre le racisme et les discriminations.

- Jean-Pierre Le Glaunec, professeur titulaire d'histoire des Etats-Unis et d'histoire des Amériques noires, directeur du département d'histoire de l'université de Sherbrooke, Canada.
"Une arme blanche. La mort de George Floyd et les usages de l'histoire dans le discours néo-conservateur."
A travers cet essai, à la suite des mobilisations qui ont suivi la mort de George Floyd autour du slogan « Black Lives Matter », de part et d’autre de l’Atlantique, il s’agit d’identifier de manière critique les (més)usages de l’histoire dans la construction d’un discours néo-conservateur à finalités politiques. Cette communication soulignera combien les héritages de l’esclavage constituent une réalité toujours actuelle et socialement vive. Soulignant la complexité de cette histoire, avec ses spécificités spatiales et temporelles, en s’appuyant sur la rigueur de la méthode historique, elle ouvrira la discussion sur les enjeux politiques toujours actuels de ces traces d’un passé qui est encore loin d’être passé.

   

Session de l'après-midi
Travail esclave, résistance et liberté. Parcours de vie : des ressources pour enseigner.

Enseigner l’histoire de la traite négrière, de l’esclavage, de leurs abolitions et de leurs héritages peut constituer une question sensible et complexe à aborder avec les élèves. Il ne s’agit pas seulement d’une histoire de « flux » massifs et anonymes de « marchandises », participant à une première mondialisation, mais de l’histoire de personnes réduites en esclavage. Il s’agit aussi d’éclairer la genèse et le développement d’un racisme à l’encontre de la couleur de peau servant à justifier un processus d’exploitation. Comment aborder avec les élèves ce passé tragique sans tabou et enseigner cette histoire dans toute sa complexité ? Comment articuler aujourd’hui histoire, mémoires, enjeux civiques à l’école ou dans des espaces de médiation culturelle, pour lutter contre le racisme et pour éduquer en vue d’une société plus respectueuse de toutes et tous et plus juste ?

Les enregistrements des intervenants sont accessibles en dépliant la liste de lecture disponible dans le lecteur ci-dessous.

> Intervenants

- Marie-Albane de Suremain, maîtresse de conférences en histoire, CESSMA, UPEC- INSPE de l’académie de Créteil & Eric Mesnard, CIRESC, ancien formateur en histoire à l’UPEC-INSPE de l’académie de Créteil.
Parcours de vie et stratégies de femmes et d’hommes réduits en esclavage : enseigner l’histoire des traites négrières et de l’esclavage à travers les acteurs.
L’ouvrage "Enseigner les traites, les esclavages, leurs abolitions et leurs héritages" présente des retours sur expériences à l’école primaire ou dans le secondaire, des analyses des programmes scolaires ainsi que des représentations de la traite négrière, de l’esclavage et de ses héritages dans l’espace scolaire et plus largement dans la société. Ces entrées sont abordées à travers des recherches précises sur l’Afrique de l’Ouest, l’Amérique centrale et les Caraïbes, et l’Europe. La communication soulignera que de la variété des points de vue rassemblés sur cette histoire commune, il ressort notamment que les récits ou les traces de ces vies de femmes et d’hommes réduits en esclavage constituent une ressource précieuse pour enseigner. S’appuyer de manière contextualisée sur l’expérience de ces personnes, l’exploitation de leur travail, mais aussi sur leurs stratégies, leurs aspirations et leurs résistances, replace l’histoire de l’esclavage dans toute sa complexité historique, humaine et sociale. Cette page d’histoire permet aussi d’étayer la construction des enjeux civiques actuels avec les élèves.

- Sébastien Ledoux, Centre d’Histoire Sociale des Mondes contemporains, Paris I.
"Circulations de la traite atlantique et de l'esclavage dans les espaces scolaires : entre histoire, mémoire et EMC."
La communication présente des enseignements de la traite atlantique et de l'esclavage effectués à l'Ecole, en France, à partir de l'observation de pratiques de classe et d'entretiens réalisés avec élèves et enseignants. Ce passé est reformulé selon les milieux sociaux des élèves et les finalités civiques et morales des enseignants, dans le contexte d'une société en prise avec des enjeux mémoriels qui traversent l'espace scolaire.

- Jean-Pierre Le Glaunec, professeur titulaire d'histoire des Etats-Unis et d'histoire des Amériques noires, directeur du département d'histoire de l'université de Sherbrooke, Canada.
"Esclaves mais résistants. Dans le monde des annonces pour esclaves en fuite. Louisiane, Jamaïque, Caroline du Sud (1801-1815)"
A partir de l’ouvrage éponyme, cette communication s’appuiera sur l’analyse des annonces publiées dans des journaux au sujet d’esclaves en fuite, afin de retrouver et de restituer les stratégies des hommes et des femmes réduites en esclavage pour résister à leur situation d’esclaves. Au-delà d’approches qui peuvent être uniformisantes et déshumanisantes, ou comptables, et qui pourraient être seulement « victimaires », cette approche socio-culturelle de sources et de trajectoires de vie permet de renouveler l’histoire de l’esclavage en s’intéressant au point de vue des personnes réduites en esclavage.

- Ibrahima Seck, maître de conférences en Histoire, Université Cheikh Anta Diop, Dakar, Sénégal, Directeur de Recherche à la Whitney Plantation Foundation, Nouvelle-Orléans, Etats-Unis.
"Des voies nouvelles pour enseigner l’histoire de la traite négrière au Sénégal et pour représenter l’esclavage aux Etats-Unis."
Dans cette communication, des pistes seront proposées pour montrer comment l’enseignement de la traite négrière en Afrique de l’Ouest peut ne pas se limiter à la visite du lieu de mémoire que représente l’ile de Gorée, mais aussi mobiliser les ressources locales, pour construire avec les élèves une connaissance plus complète de cette histoire. Aux Etats-Unis, l’exemple du musée de la Whitney Plantation en Louisiane soulignera la richesse de la médiation culturelle et pédagogique pour faire connaître la réalité de l’esclavage et ouvrir à la réflexion sur le passé et ses liens avec le présent.

- Sue Peabody, Professeure titulaire de la Chaire Meyer en arts libéraux et histoire à l’université d’Etat du Washington aux Etats-Unis.
"Les femmes autour de Furcy : esclavage et liberté d’une perspective féminine."
Furcy Madeleine, homme tenu en esclavage à La Réunion et qui a gagné sa liberté, n’aurait jamais réussi sans les efforts de ses proches : sa mère, Madeleine, sa soeur libre, Constance, ses compagnes, et sa femme. Comment les expériences de l’esclavage et de la liberté différaient-elles pour les femmes et les
hommes ? La communication montrera comment considérer l’esclavage et la liberté dans une perspective féminine met en lumière le fondement de la société patriarcale. La communication s’appuiera sur l’ouvrage de S. Peabody, "Les enfants de Madeleine. Famille, liberté, secrets et mensonges dans les colonies françaises de l’Océan indien" , Paris, Karthala, 2019.
 

Partenaires :

Centre International de recherches sur les esclavages et post-esclavages - CIRESC (CNRS - USR 2002)
Centre d'études en sciences sociales sur les mondes africains, américains et asiatiques - CESSMA UMR 245

Contact :

Marie-Albane de Suremain : marie-albane.desuremain@u-pec.fr