« L'habit d'emprunt » : Supercheries littéraires. Tissage des arts

Publié le 11 juin 2011 Mis à jour le 21 septembre 2022

Ce colloque a interrogé la création contemporaine (littérature, musique, peinture, photographie etc.) par le biais de la rencontre entre l'habit (de soi) et l'emprunt (à autrui, à un autre auteur, à un autre artiste). Appréhender une œuvre comme un habit d'emprunt revient à penser en termes d'habits et d'habillages, de toilettes et de costumes, de parures mais aussi de reliques et/ou de fétiches. Quand peut-on dire d'une œuvre qu'elle avance masquée ? De quels habits d'emprunt privilégiés – s'ils existent – se drape-elle ? Que gagne-t-on à penser une œuvre par (avec) la métaphore vestimentaire ? En quoi ces emprunts éloignent-ils le sujet de toute souveraineté et posent-ils la question de l'être (cf. P. Ricoeur), de la représentation et de l'interprétation du monde?

Les études ont abordé les œuvres françaises, francophones mais aussi étrangères comme des expériences multiples (imaginative, mémorielle et émotionnelle) en les confrontant par exemple aux notions de fiction, d'invention du sujet, de représentation du monde, de théâtralisation, d'imposture, de supercherie, de tissage artistique mais aussi d'image(s). Les contributions ont exploré le cas où l'auteur lui-même met en jeu des procédés de falsification : pseudonymes, textes apocryphes et autres stratégies d'usurpations identitaires (cf. J-M.Querard). Elles ont également exploré le jeu et les enjeux des supercheries (truquées ou non) dans des œuvres photographiques contemporaines (celles de Gérard Macé par exemple), dans des œuvres de l'artiste plasticien Gilles Rocher notamment, ou dans des installations d'objets (Miguel Almiron en particulier). L'image de l'habit « emprunté » a paru apte à décrire certaines créations contemporaines, qui, dans le dialogue qu'elles nouent avec leur temps, se refusent à une identification générique précise.
 
L'habit d'emprunt est aussi celui du lecteur et du spectateur qui sont, dans cette perspective, tributaires de cette dissimulation première. Ils se plient à ce jeu de masques que leur imposent ces œuvres qui ne sont jamais autant elles-mêmes que lorsqu'elles se donnent dans une énigmatique altérité. Si lire (ou regarder) équivaut à se prendre pour autrui, c'est aussi prendre la vie d'autrui. Mais que prend-on au juste ? Observer le lecteur en construction a consisté à analyser les rapports entre l'auteur, le texte et le lecteur, notamment lorsque l'auteur réécrit ses œuvres pour la jeunesse. En interrogeant par exemple les ouvrages de Michel Tournier, les intervenants se sont demandé si la littérature de jeunesse revêtait les habits de la littérature générale. Ils ont questionné, d'un point de vue didactique, la notion de sujet-lecteur (de l'école au lycée) et ont interrogé la manière dont le lecteur, dans le contexte scolaire, manifeste les traces de ses emprunts aux auteurs qu'il étudie ou lit personnellement.

Pour enrichir la réflexion de ces  journées, le colloque a accueilli des écrivains et des artistes contemporains.